Xavier Rosset traverse l’Atlantique en solitaire
Au large du Cap-Vert, à des milliers de kilomètres de la terre ferme, l’aventurier valaisan Xavier Rosset poursuit la traversée de l’Atlantique sur un voilier, entièrement seul à bord. Nous avons pu l’atteindre par téléphone en début de semaine passée, alors que seul le vent accompagnait sa voix.

Ce n’est pas la première fois que Xavier Rosset met son existence entre les mains des éléments. Le public se souvient de sa longue expérience en totale autarcie sur une île déserte du Pacifique : 300 jours pour survivre, construire, s’adapter. Puis un tour du monde en ULM, 400 jours à survoler des continents. Deux aventures qui auraient pu suffire à rassasier bien des curieux du monde. Mais Rosset, lui, poursuit une quête qui semble sans fin : aller là où peu de monde s’est rendu.
"Le voilier permet d’aller dans des endroits où peu de gens vont", résume-t-il aujourd’hui depuis son bateau. L’idée n’est pas de battre un record, ni de prouver quoi que ce soit. Le moteur est ailleurs : ressentir l’inconnu, observer la planète depuis ses zones les plus inaccessibles. Et, comme souvent dans son parcours, la solitude n’est pas un frein, mais une condition. "Je me sens plus en sécurité seul qu'accompagné", confie-t-il, presque comme une évidence.
Parti de Grèce puis d’Espagne, il progresse désormais vers les Antilles. L’itinéraire n’est pas figé, mais il vise la Martinique, la Guadeloupe, puis Saint-Martin.
Une mécanique de survie réglée au milimètre
Sur l’Atlantique, aucun jour ne se ressemble, mais tous obéissent à la même exigence : ne jamais laisser le hasard décider. Dès son réveil, ou plutôt après chacune de ses micro-siestes, Rosset se penche sur les données météo. "Ce qui est très important, c’est de prendre pas mal d’infos et d’ajuster la route selon les conditions", explique-t-il. Les alizés ont enfin pris leur souffle et l’aident désormais à avancer plus vite vers l’ouest.
Sur le pont, chaque geste compte : régler les voiles, écouter le grincement du voilier, repérer une tension anormale. Le bateau devient un organisme vivant qu’il faut surveiller en permanence. Une casse mineure peut se transformer en menace majeure loin de tout port.
Le sommeil, lui, n’est qu’une succession de pauses : "Je dors trois quarts d’heure à une heure, pas plus." Rosset se relève alors, scrute la mer, vérifie son cap, s’assure que son voilier tient sa route avant de recommencer. Une cadence qui use les corps comme les esprits : "C'est le plus gros challenge".
La nourriture répond à la même logique pragmatique : des réserves pensées pour durer, pâtes, corned-beef, conserves et quelques apports fraîchement pêchés. Les poissons volants, surtout. "Hier matin, j’en avais cinq suffisamment gros pour les manger", rit-il.
Ne surtout pas tomber à l'eau
Dans cette immensité liquide, un danger domine tous les autres : la chute à la mer. C’est un scénario simple à comprendre. Si Rosset glisse par-dessus bord, il n’y a personne pour arrêter le bateau, pour jeter une bouée, pour faire demi-tour. "Si je tombe à l’eau, j’ai une espérance de vie de quelques heures." Le gilet de sauvetage et le harnais ne le quittent donc jamais. Une ligne de vie court sur le pont, à laquelle il reste attaché en permanence. "Tomber à l’eau, c’est le pire qui puisse arriver."
Ce quotidien fait de risques et de solitude s’accompagne heureusement de moyens de communication modernes. Grâce au réseau satellitaire Starlink, il garde un lien avec ses proches, accède aux cartes météo et partage parfois des images de sa progression. Une fenêtre numérique qui n’efface rien du reste : là-bas, il est seul avec la mer.
La solitude
Xavier Rosset connaît bien la solitude, mais celle qu’offre un océan entier change tout : "Ici, j’ai déjà tout. Mon but est de faire avancer le bateau pour arriver à destination." Pas de cabane à construire, pas de quête de nourriture sous les palmiers. Juste un cap, une ligne droite vers l’ouest.
La peur se tient à ses côtés, discrète, mais nécessaire. "Le jour où on n’a plus peur, c’est là où on signe son arrêt de mort", affirme-t-il. Elle lui rappelle l’attention qu’exige chaque manœuvre, chaque pas sur un pont parfois glissant.
Pour rester ancré, le Bagnard cultive des rituels. La musique adoucit le vent. Les levers et couchers de soleil deviennent des rendez-vous. Et chaque soir, il espère surprendre ce mystérieux "rayon vert" aperçu par certains marins lorsque le soleil s’efface à la mer.
L'aventure
Interrogé sur le sens de cette nouvelle aventure, Xavier Rosset refuse les réponses toutes faites. L’exploit n’est pas son étendard, l’essentiel se situe ailleurs, dans l’acte de partir, de se lancer. "C’est toujours le premier pas qui est le plus difficile", affirme-t-il. Quitter l’acquis, l’habitude et le confort est déjà une victoire.
Lui ne cherche pas à incarner un modèle, encore moins un "Valaisan exemplaire". Il croit plutôt que chacun doit tracer sa voie : "Du moment que tu commences à faire ce que tu veux, c’est impossible de revenir en arrière. C’est addictif."
Suivre son aventure
Rosset n’alimente pas un feuilleton quotidien. Il publie quand la connexion le permet, et surtout quand il estime qu’il a quelque chose à montrer. Parfois un lever de soleil, parfois un repas ou un paysage à couper le souffle. Parfois rien pendant plusieurs jours.
Vous pouvez suivre sa progression en direct ici : https://share.garmin.com/xavierrosset
Ou alors consulter son profil Facebook : https://www.facebook.com/xavier.rosset.5







