Vincent Praplan : «Cette saison, le sport en lui-même n’est pas le plus important»
C’était la dernière équipe de National League à ne pas avoir été touchée par la pandémie. Le CP Berne a fini par être vaincu à son tour par le virus et les Ours, après avoir connu un début de saison délicat, se trouvent actuellement en quarantaine. Nous avons pu joindre leur attaquant valaisan Vincent Praplan, lui-même positif. Interview.

Vincent Praplan, la première question qu’on a envie de vous poser c’est comment allez-vous?
Plutôt bien c’est gentil. Bon, ça fait quand même six ou sept jours que je suis chez moi donc je commence à m’ennuyer.
Justement, comment est-ce que vous occupez vos journées en quarantaine?
C’est clair qu’elles sont assez longues. Heureusement, le club nous a mis à disposition des vélos d’appartement donc on s’occupe comme ça et on cherche de nouvelles manières de s’entraîner. À titre personnel, j’ai rempli un sac à dos de bouteilles pleines pour faire des squats. Sinon, je lis beaucoup, je regarde des séries et je cuisine plus que d’habitude.
Vous avez un programme établi par votre club pour vous maintenir en forme?
Oui. Tous les matins, on a droit à un entraînement collectif via zoom. On a une coach qui nous fait faire du speening, ça nous permet de garder la forme et d’avoir quand même des contacts entre nous.
Les contacts, justement, c’est plus compliqué de les maintenir en étant chacun chez soi?
Disons qu’ils ne sont pas quotidiens avec tout le monde. Il y a bien sûr des messages qui sont échangés sur notre groupe d’équipe et on prend surtout des nouvelles des coéquipiers avec lesquels on est le plus proche.
Vous-même avez été testé positif. Vous ressentez des symptômes en particulier?
Non heureusement, je n’ai pas eu grand-chose. Je suis juste un peu enrhumé et quand je mange, je perds parfois le goût mais ça revient aussi vite. Je pense donc avoir été assez chanceux dans ma malchance.
«C’est spécial de vivre à deux sans pouvoir avoir de contacts physiques»Vincent Praplan
Votre quotidien à domicile, avec votre compagne, comment cela se passe?
Elle est aussi en quarantaine donc ça complique forcément les choses. Heureusement, on a deux étages à la maison donc je suis en-haut et elle en bas. Et quand je dois descendre pour aller me chercher à manger ou aller aux toilettes, je porte un masque. C’est spécial de vivre ensemble sans pouvoir avoir de contacts physiques. On se console en parlant entre nous, elle sur les escaliers et moi dans mon lit et on espère que la situation s’améliore rapidement.
Vous étiez la dernière équipe à ne pas encore avoir connu la quarantaine en National League. Cette saison n’est-elle pas un peu biaisée par la crise sanitaire?
C’est clair que c’est compliqué. Cette saison, le sport en lui-même n’est pas le plus important. Ce qui compte c’est la survie des clubs. De notre côté, on essaie de faire notre partie du job. On voit le moins de monde possible pour limiter les risques d’infections mais on sait qu’on peut très bien préparer une rencontre et que celle-ci soit annulée à quelques heures du coup d’envoi. Physiquement et mentalement, ce n’est pas toujours facile. Mais encore une fois, l’important est que les clubs survivent et que l’on puisse continuer à jouer au hockey dans les années à venir.
Dans ces conditions difficiles, vous arrivez à vous projeter et à imaginer la suite et la fin de cet exercice?
Écoutez, on essaie plutôt de prendre les choses les unes après les autres, sans trop s’imaginer ce qui se passera potentiellement dans le futur. On essaie plutôt de profiter de chaque entraînement, de prendre un maximum de plaisir. On le voit depuis une semaine en étant en quarantaine, c’est spécial d’être privé de glace. Ce n’est pas facile mais bon, on sait très bien que c’est la même chose pour tout le monde.
«Ici, quand tu rentres sur la glace, tu as l’habitude de faire face à un mur de 10'000 personnes qui scande ton nom. Là, il faut trouver des solutions pour mettre l’ambiance nous-mêmes»Vincent Praplan
Cette saison est forcément particulière, notamment, en raison du huis-clos imposé partout en Suisse. À Berne, dans votre immense patinoire, l’atmosphère doit être encore bizarre qu’ailleurs, non?
C’est clair. Ici, quand tu rentres sur la glace, tu as l’habitude de faire face à un mur de 10'000 personnes qui scande ton nom. Si ça t’arrive de ne pas être à 100%, au plus tard quand tu sors du vestiaire et que tu vois tout ce monde tu es dedans. Là, il faut trouver des solutions pour mettre l’ambiance nous-mêmes. On parle plus sur le banc, on fait du bruit quand il y a un bon tir ou un joli geste défensif. Mais ça ne remplace en aucun cas le public qui fait partie du sport. C’est aussi pour ça que l’on fait ce métier donc c’est une grande partie du hockey dont on est privé actuellement.
Avant d’être placé en quarantaine, votre équipe réalisait un début de saison poussif avec seulement 13 points de pris en 12 rencontres. Comment l’expliquez-vous?
C’est difficile. Disons qu’il y a beaucoup de raisons qui peuvent être invoquées. On sort d’une saison compliquée, la préparation a été bizarre et on a un nouveau style de jeu. On a perdu plusieurs matches de suite, notamment contre des équipes habituées au bas de classement donc il faut trouver des solutions. Peut-être que cette pause arrive au bon moment pour nous, elle va nous permettre de récupérer physiquement et mentalement pour être au top quand on pourra reprendre.
Pourtant après un exercice déjà compliqué l’an dernier avec une non-qualification pour les play-offs, vous avez accueilli un nouvel entraîneur en la personne du Canadien Don Nachbaur. Celui-ci a donné sa démission ce mardi. Son message et ses idées ont eu de la peine à passer?
Non, je ne pense pas. C’est juste que cela prend toujours du temps d’assimiler un nouveau style de jeu. Surtout que celui qu'il voulait mettre en place était totalement différent de ce que l’on avait connu l’an dernier. On a aussi de nouveaux joueurs qui doivent s’acclimater à leur nouvel environnement donc là aussi, c’est un ensemble de facteurs qui font que cela n'a pas encore tourné comme cela devrait. Mais je suis convaincu que l’on a tout pour y parvenir rapidement.
«On a vu que plusieurs formations ont connu du succès en revenant de quarantaine donc on espère que ce sera pareil pour nous»Vincent Praplan
À titre personnel, vous devez rester isolé jusqu’à ce week-end au minimum. Votre équipe en revanche est censée reprendre la compétition en affrontant deux fois de suite Zoug jeudi et vendredi. Deux rencontres qui n’auront pas été préparées de manière très optimale…
C’est sûr. Mais bon, Zoug est aussi en quarantaine donc les deux équipes partiront plus ou moins du même point. Après, forcément que sortir de dix jours sans glace et enchaîner deux matches en 24 heures, c’est compliqué, aussi bien physiquement que mentalement. Ce sera une première pour nous mais on a vu que plusieurs formations ont connu du succès en revenant de quarantaine donc on espère que ce sera pareil pour nous.
Indépendamment de l’incertitude liée à la pandémie, comment voyez-vous la suite de cette saison au niveau sportif?
Tout ce que je peux vous assurer, c’est que l’on va tout faire pour grimper au classement. On était très frustrés ces dernières semaines, l’ambiance s’en ressentait car tout le monde était mécontent de notre début de saison. On a beaucoup parlé et on a cherché des solutions. Notre dernière victoire contre Rapperswil était déjà un pas dans la bonne direction qu’il s’agira maintenant de confirmer. On va aller de l’avant, continuer à bosser jour après jour car on ne veut pas se contenter du bas de tableau.
