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Tanguy Darbellay: «Cette année m’a donné plusieurs leçons de vie»

Il était touché physiquement et psychologiquement il y a quelques mois, il s’est investi pour venir en aide aux Ukrainiens et il a pensé à lui en «s’offrant» plusieurs voyages et autant d’expériences différentes. Pas encore finie, l'année 2022 du lutteur Tanguy Darbellay aura été chargée.

Christophe Moreillon
Christophe Moreillon, Rédaction Rhône FM
03 nov. 2022, 08:00
Tanguy Darbellay
Tanguy Darbellay ©Rhône FM

«L’odeur de la lasagne me rappelle le chemin», se marre Tanguy Darbellay lorsqu’on lui demande s’il sait encore où il habite. La question ne tombe pas de nulle part. Ces derniers mois, le lutteur martignerain a multiplié les voyages. En quête d’expériences en tous genres d’une part. En quête de lui-même surtout. «L’année a été intense et elle m’a donné plusieurs leçons de vie. Ce que je retiens avant tout, c’est qu’il faut accepter l’échec. C’est la seule solution pour en tirer de la substance et rebondir.»

Il était dégoûté de son sport

Rebondir, le Valaisan a dû le faire après une blessure subie au début 2022. «Ce pépin physique m’a poussé à beaucoup réfléchir», avoue celui qui a souffert d’une fatigue tant physique que psychologique. «J’en suis arrivé au point d’avoir de la peine à pratiquer mon sport. Voir le tapis me mettait la boule au ventre. J’étais dégoûté de ce milieu. Je me suis alors dit qu’il fallait que je mette en place quelque chose qui me redonne un nouvel élan. Je ne voulais pas finir comme ça. Je devais retrouver ce sport que j’aime tant.»

«Je voyais mes adversaires progresser et j’avais la sensation d’être mauvais dans cette discipline à laquelle j’ai consacré ma vie depuis 15 ans.» Tanguy Darbellay

Tanguy Darbellay s’est battu. Il a lutté avec les autres mais surtout avec lui-même pour se relever de cette période noire. «Après ma blessure, j’ai du réapprendre beaucoup de choses. Même à marcher durant une ou deux semaines. Je voyais mes adversaires progresser et j’avais la sensation d’être mauvais dans cette discipline à laquelle j’ai consacré ma vie depuis 15 ans. De nombreuses questions se bousculaient dans mon esprit.»

Directement concerné par les événements en Ukraine

Comme si ses maux personnels ne suffisaient pas, le Martignerain a été confronté à une thématique bien plus dramatique encore dès la fin février. Habitué à se rendre dans les pays de l’Est de l’Europe, il a été directement touché par le déclenchement de la guerre. «J’ai beaucoup d’amis en Ukraine», explique celui qui accomplissait son école de recrue en tant que soldat du sport à Macolin au moment des premières offensives russes. «J’ai dû m’absenter plusieurs fois pour répondre aux quelques demandes d’aide qui m’étaient adressées. Vous savez, j’ai pratiquement passé une année de ma vie en Ukraine. J’ai eu la chance de manger leur nourriture, de boire leur eau, j’ai côtoyé leurs amis et leurs familles, j’ai pu utiliser leurs salles d’entraînements, ils m’ont partagé leur sueur,… Ne pas être capable de leur offrir trois mois de mon temps pour leur rendre la pareille, ça aurait été petit.»

«J’ai de la peine avec ces gens qui ont besoin de crier sur tous les toits qu’ils ont rendu tel ou tel service.» Tanguy Darbellay

Le Valaisan s’est donc lui-même rendu à la frontière pour amener des réfugiés en Suisse. Il s’est investi comme interprète pour faciliter leur intégration. En toute discrétion. «J’ai de la peine avec ces gens qui ont besoin de crier sur tous les toits qu’ils ont rendu tel ou tel service», souffle-t-il. Après avoir adapté son début de saison, passé presque intégralement en Suisse et essentiellement à Macolin, Tanguy Darbellay a ensuite pensé à lui. Toujours à la recherche de ce fameux nouvel élan, il s’est concocté un programme chargé, fait de nombreux voyages.

Un marathon de voyages

Le Martignerain détaille son «marathon» des derniers mois. «Ça a commencé par deux semaines en Azerbaïdjan, suivi d’un séjour en Pologne avec l’équipe de Suisse puis il y a eu plusieurs projets personnels.» Parmi eux, un camp de trois semaines au milieu des montagnes géorgiennes. «C’est l’un des pays les plus importants dans le monde de la lutte. Je voulais donc aller voir à quoi ça ressemble. J’étais intéressé à observer plus en détail cette mentalité particulière que j’avais remarqué chez certains de mes amis géorgiens. Voir comment les meilleurs lutteurs du monde s’entraînent, vivent et interagissent entre eux était très enrichissant.»

«Dans les pays de l’Est, les lutteurs sont coupés très tôt de leur famille. Ça donne lieu à une grande fraternité qui pousse au dépassement de soi.» Tanguy Darbellay

Tanguy Darbellay assure s’être ressourcé, là, en plein cœur de la Géorgie. Sans perturbateur externe comme il le dit, il s’est réconcilié avec son sport. «Dans les pays de l’Est, les lutteurs sont coupés très tôt de leur famille et ils vivent en communauté tous ensemble. Ça donne lieu à une grande fraternité qui est très saine. Qui pousse au dépassement de soi.» Son parcours s’est poursuivi en Israël où il a pris la 2ème place du Mémorial des Martyrs à Beer-Sheva. Une compétition qui l’a toutefois vu repartir avec une blessure.

5ème des Mondiaux universitaires

Un nouveau pépin physique qui a entravé sa préparation des championnats du Monde universitaires lors desquels il s’est aligné sous la bannière d’UniDistance auprès de qui il suit un Bachelor en économie et management. «Ma participation à cette compétition était un vrai projet personnel. J’ai pris seul la décision de partir pour la Turquie. Je voulais représenter dignement UniDistance qui m’a toujours poussé vers le haut. Défendre l’honneur d’une structure bienveillante avec moi n’a pas de prix. Je voulais voir si ça changeait quelque chose à ma motivation. J’ai fini par prendre la 5ème place et je m’en contente. Je sais que j’aurais pu faire mieux mais j’aurais très bien pu faire moins bien aussi.»

«Jouer des matches qui sont gagnés d’avance c’est bien beau. Lutter en partant perdant, il faut aussi l’expérimenter.» Tanguy Darbellay

Quelques semaines plus tard, c’est en Espagne que Tanguy Darbellay a vécu d’autres Mondiaux, ses derniers en catégorie U23. «Une belle expérience et un bel exercice de résilience», résume-t-il en référence à cet événement dont il est rentré il y a une dizaine de jours. «J’ai dû combattre sur deux jours. Il a donc fallu perdre deux fois six kilos et demi. En qualifications, je me suis incliné contre le futur champion du monde et lors des repêchages, je suis tombé face à celui qui a conquis le bronze. Jamais je n’avais affronté des lutteurs de ce niveau-là. Les avoir l’un après l’autre comme ça, c’est magique mais ça fait aussi mal derrière la tête quand ils tapent (rires). Plus sérieusement, je ne pense pas pouvoir tomber sur un défi plus dur que celui-là à l’avenir. Je ne peux donc en retirer que du positif. Jouer des matches qui sont gagnés d’avance c’est bien beau. Lutter en partant perdant, il faut aussi l’expérimenter.»

Les Jeux ne sont plus un objectif

Désormais trop âgé pour concourir en U23, Tanguy Darbellay ne fait pas de plans sur l’avenir. «Ce que je souhaite aujourd’hui? La santé pour ma famille et moi. C’est le plus important.» On l’interroge donc sur la perspective d’une participation aux Jeux Olympiques dans deux ans. «Paris 2024 a été un objectif à un moment donné. Aujourd’hui en revanche, ce n’est plus une priorité. Dans mon parcours, j’ai profité des pays de l’Est, de la Biélorussie notamment. Prendre part à une compétition à laquelle elle est interdite, ce serait hypocrite de ma part. Ce ne serait pas respectueux pour ce qu’ils ont fait pour moi dans le passé.»

CM
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