L’impensable saison du Bagnard Denis Corthay

Huit ans après la retraite de Didier Défago, le Valais devrait très prochainement être à nouveau représenté dans les disciplines de vitesse sur le circuit masculin de la Coupe du Monde. Trois représentants de notre canton s’illustrent actuellement sur le front de la Coupe d’Europe et peuvent prétendre, à court ou moyen terme, à une place au plus haut niveau. Le Martignerain Arnaud Boisset, leader du général du Super-G, semble aujourd’hui le mieux placé. Derrière lui, l’Arbazien Christophe Torrent a également des atouts à faire valoir. Et puis, le petit dernier de la bande s’appelle Denis Corthay. À seulement 19 ans, le Bagnard s’illustre cet hiver dans l’antichambre de l’élite aux côtés de ses deux aînés.

Un trio qui se tire vers le haut

«L’ambiance entre nous est magnifique», relève le skieur du Châble. «Il y a deux semaines à Garmisch, on s’est retrouvés les trois dans le top 10. Lorsque les résultats sont au rendez-vous chez tout le monde, c’est tout le groupe qui est tiré vers le haut. Depuis que j’ai rejoint ce groupe de Coupe d’Europe, Arnaud et Christophe ont toujours été là pour répondre à mes questions. Ils sont heureux de pouvoir partager leur expérience et c’est quelque chose qui ne peut forcément qu’être bénéfique pour moi.»

«Mon objectif était de pouvoir m’élancer quelques fois à ce niveau-là cette saison. À aucun moment, je n’imaginais pouvoir jouer tout devant.»Denis Corthay

Complices, les trois compères se tirent la bourre depuis le début de l’année 2023. Ensemble, ils totalisent quinze tops 10 dont six podiums en dix courses. À titre personnel, Denis Corthay a terminé quatre fois «dans les dix» et une fois sur la boîte alors qu’il ne compte à ce jour que quatorze départs en Coupe d’Europe. «Honnêtement, ma saison est impensable», sourit-il. «Il y a quelques mois, mon objectif était simplement de pouvoir m’élancer quelques fois à ce niveau-là. À aucun moment, je n’imaginais pouvoir jouer tout devant. Je profite donc du moment, je skie sans réfléchir…et on continue comme ça!»

Un premier podium sur le mythique Lauberhorn

Interrogé à ce propos, le Bagnard peine à expliquer les raisons de son succès aussi précoce qu’inattendu. «Je ne cherche pas forcément à comprendre. J’essaie simplement de rester dans le même mood pour continuer sur cette pente ascendante.» Une pente entamée le 6 janvier dernier dans un haut-lieu du ski alpin. Parti avec le dossard 54, il réalisait un véritable exploit pour terminer 2ème du Super-G de Coupe d’Europe sur le mythique Lauberhorn de Wengen. «J’étais très décontracté dans le portillon. Au vu de mon dossard, je n’avais aucune pression. J’espérais simplement terminer parmi les trente premiers», se souvient-il. «À partir de la tête de chien, j’avais la sensation de ne plus être dans ma course. Je profitais simplement du moment que j’étais en train de vivre. J’ai vraiment été surpris d’à quel point je prenais mon pied au fil des différents passages. Le chemin, le tunnel et puis l’arrivée…Là, quand j’ai vu le chiffre 2 s’afficher, je n’ai rien compris! Je n’y croyais pas jusqu’à ce que les résultats officiels tombent. Et ensuite, j’ai reçu des messages de partout, c’était magnifique!»

«Pouvoir intégrer le cadre B de Swiss-Ski me permettra de travailler encore plus sur la vitesse.»Denis Corthay

Grâce à ses récents résultats, l’actuel membre du groupe NLZ Ouest s’apprête à vivre un changement d’importance. «J’ai rempli les critères pour intégrer le cadre B de Swiss-Ski. C’est une superbe opportunité qui me permettra de travailler encore plus sur la vitesse. Même si le travail qui est fait au NLZ est très bien, quitter ce cadre était l’un de mes objectifs.»

En «mode course» même en tant qu’ouvreur

Comme pour ses coéquipiers, le prochain rendez-vous de Coupe d’Europe de Denis Corthay est fixé dans deux semaines à l’occasion des finales de Narvik en Norvège. Les descentes de Saalbach ayant été renvoyées cette semaine, il a pu, comme Arnaud Boisset, officier en tant qu’ouvreur lors des épreuves de Coupe du Monde féminine du week-end passé à Crans-Montana. «C’était une belle opportunité d’avoir des manches de vitesse en plus dans les jambes. Même si j’étais assez relax avant de prendre le départ, une fois le portillon quitté, je me suis mis en «mode course» et j’ai vraiment profité du moment.»

«En partant en tant qu’ouvreur, je me suis dit que je pouvais faire le show.»Denis Corthay

Malgré une chute sans gravité dimanche, le Bagnard dit avoir apprécié l’expérience sur la piste du Mont-Lachaux. «Je vous avoue quand même avoir eu un peu d’appréhension dans certains virages», sourit-il. «L’ambiance était fantastique avec tout ce public présent. En partant en tant qu’ouvreur, je me suis dit que je pouvais faire le show. Beaucoup de proches sont venus me voir, mon frère mais aussi plusieurs amis et connaissances.»

Les pieds bien ancrés sur terre

Durant deux jours, Denis Corthay a pu découvrir l’envers du décor du circuit de Coupe du Monde. «Tout ce qui se passe hors caméras lorsque tu regardes une course à la TV», rigole-t-il. Il sait ainsi désormais à quoi s’attendre lorsqu’il enfilera un (vrai) dossard en Coupe du Monde ces prochaines années…si ce n’est pas ces prochains mois. «Je pense plus que ce sera la première option», affirme-t-il. «Je dois garder les pieds sur terre. La densité est très importante en Suisse. Je pense avoir besoin d’encore deux ou trois saisons en Coupe d’Europe afin d’être vraiment prêt à faire le grand saut. Mais ce que j’ai vécu ce week-end à Crans-Montana est évidemment une grande source de motivation pour la suite.»