Yohan Aymon, à Nyon pour s'affirmer chez les pros : "Au FC Sion, je n'ai eu ma chance qu'à moitié"
Il fait partie de l'imposante délégation valaisanne à défendre désormais les couleurs du Stade Nyonnais. À 23 ans, Yohan Aymon a rejoint Colovray après plusieurs mois très mouvementés, débutés par une fin d'aventure amère avec "son" FC Sion et prolongés par deux escales particulières.

À l'exception des premiers ballons dans lesquels il avait tapé à Conthey dans ses plus jeunes années, Yohan Aymon n'a porté qu'un seul maillot jusqu'à cet été : celui du FC Sion. Un club sédunois dont il a gravi tous les échelons, jusqu'à devenir l'un des éléments les plus importants de l'effectif M21 ces dernières années. Aux portes de la première équipe, avec laquelle il avait pris l'habitude de s'entraîner, le Vétrozain a pourtant vu son aventure prendre fin avec son club de toujours. À 23 ans, le voilà désormais à Nyon après deux escales particulières sur son chemin en provenance de Tourbillon. Interview.
Yohan Aymon, comment avez-vous bouclé votre parcours au FC Sion?
Par un sentiment de déception. J'aurais aimé vivre mes premiers matches en tant que professionnel au sein de ce club. Les choses étaient claires depuis l'hiver dernier. Nous nous sommes mis autour d'une table avec Barthélémy Constantin, Didier Tholot et Pablo Iglesias (ndlr : alors encore engagé en tant que directeur du football) et nous avons décidé que l'aventure ne se poursuivrait pas. Au vu de mon âge, je n'avais pas envie de repartir pour un an de plus avec les M21 et je n'étais pas satisfait de moi dans le rôle de latéral, le seul qu'on m'a proposé avec la première équipe. Je me suis donc dit qu'il était temps d'envisager d'aller voir ailleurs.
Avoir marqué 20 buts en tant qu'ailier dans le championnat de 1ère ligue en 2023/2024 ne vous a donc pas suffi à briguer une place à votre poste de prédilection avec la "une"?
Non. Il n'y avait pas d'autres options pour moi que celle d'être latéral. On ne me l'a pas dit tout de suite, mais je l'ai compris à travers les entraînements.
Du coup, avez-vous la sensation d'avoir eu votre chance avec le FC Sion?
Je ne l'ai eu qu'à moitié. D'accord, on m'a intégré à la première équipe et j'en suis reconnaissant, mais j'aurais aimé qu'on me donne l'occasion de me montrer à ma vraie position. La solution retenue n'a pas été la bonne, mais au moins, nous étions tous d'accord pour le constater.
Les choses étant claires, pourquoi n'avez-vous pas quitté le FC Sion durant l'hiver?
J'aurais pu le faire puisque j'ai reçu deux offres. J'ai demandé à partir au début du mercato, mais à ce moment-là, le club m'a vite fait comprendre qu'il n'était pas d'accord. Finalement, vers la fin février, on m'a annoncé que je redescendais définitivement avec les M21 et que les portes de la première équipe se refermaient pour de bon pour moi. Malheureusement, les clubs qui s'étaient intéressés à moi n'avaient plus les moyens de m'engager. Je suis donc resté six mois de plus avec les M21, durant lesquels j'ai au moins pu rejouer en tant qu'ailier et marquer huit buts.
Arrive alors cet été durant lequel plusieurs portes s'ouvrent à vous et vous décidez d'abord de tenter l'aventure à l'étranger…
Effectivement. Avec mon agent, nous avons creusé pour trouver différentes options et j'ai fini par m'envoler pour la Slovaquie où je devais signer un contrat avec un club professionnel (ndlr : le FC Petrzalka, en 2ème division). J'arrive à Bratislava, je fais quatre entraînements en deux jours et je me rends vite compte que je ne suis pas prêt à partir si loin de la maison. Le pas était trop grand après n'avoir connu que le FC Sion. J'ai donc téléphoné à ma mère pour lui dire que j'allais prendre un billet retour. J'ai expliqué aux dirigeants que finalement, je n'allais pas signer leur contrat et ils l'ont accepté, même s'ils l'avaient un peu mauvaise car le coach comptait sur moi.
Retenez-vous quand même du positif de cette expérience très éphémère en Slovaquie?
Oui. Recevoir une offre d'un club pro à l'étranger était gratifiant. Ces quelques jours m'ont apporté des réponses à moi-même. J'ai compris que l'étranger n'était pas fait pour moi à ce moment de ma carrière.
De retour de Slovaquie, vous décidez de rejoindre Vevey en Promotion League. Pourquoi ce choix?
J'ai reçu plusieurs offres dans ce championnat, mais celle de Vevey m'a convaincu pour deux raisons. La première était le fait de pouvoir rester proche de la maison et la deuxième était la perspective d'affronter Lausanne au 1er tour de la Coupe de Suisse.
Un choix judicieux puisque lors de ce match contre Lausanne, malgré la défaite 2-1 de votre équipe, vous vous êtes illustré en touchant notamment le poteau et en marquant un certain Peter Zeidler…
C'est vrai. Il m'a fait un énorme coup de pub en parlant de moi dans la presse (rires). On m'a envoyé tous les articles où il disait que j'avais été bon et que j'avais le niveau de la Super League. À ce moment-là, je suis évidemment surpris en bien et je me dis que je ne vais peut-être pas rester éternellement en Promotion League. J'imagine un éventuel transfert durant l'hiver, mais alors que le mercato touche à sa fin, je reçois l'offre du Stade Nyonnais. Là, je n'hésite pas. Je fonce.
Surtout que la situation à Vevey n'était pas franchement optimale...
Clairement. Tout y était plus compliqué que ce que j'avais connu à Sion ou durant les quelques jours passés en Slovaquie. Des problèmes extra-sportifs mettaient à mal l'ambiance de l'équipe.
Des problèmes que vous n'aviez pas vu venir avant de vous engager?
Non, mais ça fait partie du jeu. Les dirigeants n'avaient aucun intérêt à me prévenir que la situation était à ce point compliquée. J'ai dû m'accrocher durant un mois et demi, mais je ne sais pas si j'aurais pu tenir davantage.
Le Stade Nyonnais est donc apparu comme une bouée de sauvetage pour vous?
Ah clairement! Cette proposition est arrivée au meilleur des moments. À Vevey, j'en étais venu à me poser des questions sur mon avenir. Je me suis demandé quel était l'intérêt de m'embêter à faire les trajets tous les jours sans prendre de plaisir une fois sur le terrain. Sincèrement, j'étais à deux doigts de casser mon contrat pour rester sans club.
Avez-vous carrément imaginé tourner le dos au football?
Au football avec la perspective de devenir professionnel, oui, peut-être. Mais je n'aurais pas arrêté complètement. Ce sport, c'est la chose que j'aime le plus au monde et j'aurais difficilement pu m'en passer. Mais heureusement, je n'ai pas eu besoin d'aller au bout de mes réflexions. Le destin en a décidé autrement.
Racontez-nous comment s'est mis en place votre transfert de Vevey à Nyon?
Tout a commencé un jeudi, pendant un entraînement. À la fin de celui-ci, je rentre au vestiaire et je vois plusieurs appels manqués de mon agent. Je le rappelle et il me dit qu'il faut que j'arrête de m'entraîner, car le Stade Nyonnais me veut. Sur le coup j'étais autant surpris que fier de voir que ma patience et mon travail avaient payé. Ensuite, il a fallu annoncer à Vevey que je partais. Comme les dirigeants n'était pas d'accord, nous sommes un peu partis au clash, mais au final, ça a pu se faire.
Et à Nyon, vous recevez rapidement la confiance de votre entraîneur Andrea Binotto.
Rien que d'en parler me fait plaisir. J'ai rejoint le club un mardi et trois jours plus tard, nous affrontions le Stade Lausanne Ouchy en championnat. Alors que je venais d'arriver, le coach a décidé de me faire entrer en jeu dès la 60ème. Au vu de tout ce que j'ai traversé, je ne pensais pas forcément recevoir ma chance aussi tôt. Lorsque j'ai retrouvé mon lit ce soir-là, je me suis dit que c'était fou. À Sion, j'ai touché au monde professionnel durant un an et demi sans jamais avoir droit à un match officiel et là, à Nyon, trois jours ont suffi. Cela a été une vraie belle surprise.
Une surprise rapidement suivie par une autre : cette victoire en Coupe face au grand FC Zurich. Comment l'avez-vous vécue?
C'était juste incroyable. Je n'avais jamais ressenti d'émotions aussi fortes dans ma carrière. Avant le match, nous nous sommes dit que nous n'avions rien à perdre. Pour nous, c'était l'occasion de nous tester face à une équipe de haut niveau. Sur le terrain, tout le monde s'est donné à 120%. À mesure que le match avançait, nous avons pris conscience que ça pouvait tourner pour nous. Même si nous avions tous des crampes durant les prolongations, nous n'avons rien lâché et notre gardien a fait le reste lors des tirs au but.
Et là, il y a cette scène où vous célébrez juste devant les fans zurichois…
Heureusement pour nous qu'ils ne sont pas entrés sur le terrain pour en découdre, car on n'aurait pas fait le poids (rires). Après coup, évidemment que ce n'était pas très malin de notre part. Mais sur le moment, nous étions simplement euphoriques. Nous n'avons pas pris conscience des conséquences que ça aurait pu avoir. Pour une équipe aussi jeune que la nôtre, éliminer Zurich était complétement fou. C'est pour ce genre d'émotions que l'on fait du foot.
Comment avez-vous vécu ensuite le tirage au sort des huitièmes de finale qui vous a désigné Neuchâtel Xamax comme futur adversaire?
Sur la route avec mes coéquipiers valaisans du Stade Nyonnais. Nous espérions tous affronter le FC Sion pour retrouver des visages connus en face. Cela aurait été incroyable. Malheureusement, le sort en a décidé autrement. À nous de tout faire pour passer contre Xamax et croiser les doigts pour que Sion fasse le job à Aarau. Peut-être que nos chemins se croiseront quand même ensuite.
À titre personnel, et au-delà de potentiellement le retrouver en tant qu'adversaire, avez-vous la sensation que votre histoire avec le FC Sion est définitivement terminée?
S'il y a bien une chose que j'ai appris avec tout ce que j'ai vécu ces derniers mois, c'est que rien n'est jamais acté. Il n'est donc pas impossible que je rejoue un jour sous ses couleurs qui me tiennent particulièrement à cœur. J'aimerais toujours aller au bout de ce rêve de gosse, celui de porter le maillot du FC Sion en compétition officielle. Je ne ressens plus d'amertume par rapport à comment les choses se sont passées pour moi. Tout cela est derrière et je me dis simplement que c'était écrit ainsi. Si l'occasion se présente à l'avenir, je reviendrai avec plaisir, mais je n'en fait pas une obsession. D'autres joueurs qui n'ont pas réussi à s'imposer au FC Sion l'ont fait ailleurs.
